Root Letter est un Visual-Novel dont le pitch semblait banal. Bien m’en a pris d’écouter Tentacle Blue et de le tester car ce fut une expérience incroyable.
Un simple roman à l’eau de rose?
L’opportunité de tester ce Visual-Novel nous a été offerte au sein de la rédaction de Planète Vita, mais peu de monde était emballé à tester ce VN dont les rares informations qui avaient filtré nous faisaient croire que l’on allait vivre une histoire digne d’un de ces banal roman de gare où le héros retrouve une femme depuis longtemps perdue de vue. Nous sommes donc bien loin des jeux bourrés d’action, de monstres, de méchas et de boobs que nous chérissons généralement sur PS Vita.
J’avais eu cependant il y a quelque temps l’occasion de discuter de ce jeu avec Tentacle Blue durant un podcast Vitapéro et sur Planète Vita et c’est donc sur ses conseils avisés, et ses réflexions sur les scénaristes de qualité chez Kadokawa Games, que je me suis lancé dans ce test. L’occasion était d’autant plus belle que j’avais pas mal de train de prévu et toujours aucune lecture de prévue pour ce trajet. L’opportunité aussi pour moi de me mettre aux Visual-Novels sur PS Vita et de peaufiner un peu mon anglais aussi (car oui le jeu est uniquement avec les voix japonaises sous-titré anglais et tous les menus en anglais).
Le Visual-Novel pour les nuls (aussi appelé: j’ai pas écouté l’excellentissime Vitapéro spécial VN)
Bon, l’heure n’est pas venue pour moi de vous juger même si cela me démange fortement. Pour ceux ayant un peu de temps à leur disposition, je ne peux que vous inviter à écouter le Vitapéro Spécial Visual-Novels réalisé par Tentacle Blue, Quentin de Bands Of Geeks et moi même courant Novembre.
Pour ceux qui n’auraient pas le temps (shame on you), ou souhaiteraient d’abord en savoir un peu plus sur Root Letter je vous offre une petite séance de rattrapage.
Nous allons faire un petit saut temporel avant l’avènement d’Internet, à l’époque du papier. En ces temps ancestraux, les jeux vidéo n’était pas encore légion et en l’absence d’amis pour vivre des aventures folles et interactives il ne vous restait plus qu’une solution: les livres dont vous êtes les héros. Ces livres vous permettait de vivre des aventures incroyables dans l’espace ou dans des univers fantastiques. Vous évoluez de cadre en cadre et à chaque fois un paragraphe vous explique la situation avant de vous proposer différentes options qui vous font évoluer dans l’histoire avec à la clé une fin heureuse ou plus généralement une mort horrible…
C’est ainsi que je résumerai les Visual-Novels: une adaptation en jeu vidéo des livres dont vous êtes le héros avec la force d’un support vidéo et audio qui vous fournit une représentation incroyable du récit et vous ouvre bien plus d’options qu’un livre puisse vous offrir. Les VN vous fournissent un moyen facile d’explorer des histoires palpitantes aux quatre coins de cet univers ou d’un autre.
Aux racines de l’intrigue
Venons finalement à ce qui nous intéresse: l’intrigue de Root Letter: que nous offre les gars de chez Kadokawa Games?
Vous incarnez Takayuki, un jeune homme dans la trentaine qui quitte son ancien travail pour se mettre à son compte. De passage chez ses parents, il en profite pour remettre un peu d’ordre dans ses affaires et tombe nez à nez avec une correspondance démarrée il y a quinze ans: alors au lycée à Tokyo, il échange régulièrement avec une certaine Aya Fumino, lycéenne aussi dans la ville de Matsue dans la préfecture de Shimane. Ces quelques lettres l’ont soutenu dans ces moments difficiles avant les examens de fin d’année mais après sa dixième réponse il n’a plus jamais eu des nouvelles de sa correspondante.
Quelle surprise donc lorsque celui découvre un onzième courrier pas affranchi qu’il n’a jamais lu dans le lot. Une surprise d’autant plus grande qu’à sa lecture sa correspondante lui avoue avoir tué quelqu’un, qu’elle doit se faire pardonner pour ses péchés et qu’en conséquence ils ne parleront plus jamais. Ni une, ni deux, notre héros prends l’avion pour la ville de Matsue pour avoir le fin mot de cette histoire. Arrivé sur place, vous découvrez que la maison de votre correspondante a brulé il y a de cela quinze ans et qu’il va falloir mener l’enquête auprès d’anciens camarades pour espérer la retrouver. C’est là que les différents mécanismes du jeu rentrent en action.
Les mécanismes du jeu
Root Letter s’appuie sur des mécanismes efficaces et déjà éprouvés dans d’autres Visual-Novels pour impliquer le joueur dans la narration. Bien que cela soit mon premier Visual-Novel, cela semble être bien rodé et je sens aussi la volonté d’apporter un renouveau à cette mécanique avec notamment les phases d’interrogatoires sur lesquelles je reviendrai plus tard.
Le menu principal
L’écran sur lequel vous reviendrez constamment après avoir eu une description de la situation: allez vous changer de lieu? Interroger une personne? Consulter ou utiliser un objet de votre inventaire? Réfléchir à la situation ou bien consulter votre smartphone pour charger ou sauvegarder votre progression actuelle? Beau et sobre à la fois, il contribue à la sérénité et à la beauté du jeu.
Move
Vous l’aurez deviné: cette option va vous permettre de vous déplacer dans les différents lieux explorés durant notre périple. Une chance pour nous que ceux-ci soient variés et toujours justifiés par les circonstances de l’histoire. J’ai rarement eu la sensation de faire des allers-retours de manière répétitives entre les mêmes lieux. J’ai même ressenti énormément de travail par les développeurs pour nous faire découvrir les plus beaux endroits de la ville de Matsue et j’ai adoré! Les décors sont sublimes, assez fidèles à la réalité, et vous allez presque ressentir le besoin de visiter pour de vrai la ville une fois le jeu fini!
Ask
Il va vous en falloir des questions pour avancer dans vos recherches, et c’est par ici que vous passerez. A chaque situation plusieurs questions vous seront proposées et certaines vous débloquerons des informations ou vous amènerons à des interrogatoires sur lesquels je reviendrai ultérieurement
Check
Inventory
L’inventaire, là où toutes vos acquisitions lors de votre périple sont stockées. Vous vous en servirez pour vous raffraichir la mémoire, faire du troc, ou exhiber certains éléments comme preuves lors de vos interrogatoires.
Think
Le pense-bête, parfois l’ultime recours pour votre personnage lorsqu’il est confronté à la situation qui le déplace, vous vous en servirez principalement pour vous rappeler où aller après qu’un personnage vous ai demander de faire quelque chose.
Guidebook
Le guide du voyageur de Matsue, récupérer très tôt dans l’histoire, ce guide vous permettra de découvrir quelques informations touristiques sur la ville et ses environs.
Smartphone
Le smartphone le moins smart du monde! Désolé mais vous ne vous en servirez jamais si ce n’est pour recevoir / envoyer vos appels et charger / sauvegarder vos parties (très utiles pour changer de chapitre une fois l’histoire finie une première fois). A aucun moment votre personnage n’envisagera d’utiliser son smartphone pour des recherches. Dommage…
Les interrogatoires
A partir des informations et des objets accumulés précédemment vous allez, un peu à la manière d’un Ace Attorney, enchainer les questions et présenter les éléments qui contredisent les propos des personnes interrogées. Attention toutefois à ne pas poser des mauvaises questions ou présenter des objets hors propos car si vous êtes à coté de la plaque vous risquez de voir la personne partir! Rassurez vous toutefois car si vous échouez le jeu vous fera redémarrer au début de l’interrogatoire.
3, 2, 1: let’s twist!
Root Letter vous a amené tous les mécanismes évoqués au-dessus durant les deux – trois premiers chapitres, soudainement vous vous installez dans une routine et imaginez déjà comment va se dérouler le reste de l’histoire. Vous savourez la sublime musique qui s’adapte parfaitement en fonction de la situation mais forcément la lassitude s’installe…
Quand soudain, au détour d’une conversation ou d’un interrogatoire, un élément étrange vous surprends comme un coup derrière la nuque (enfin, j’imagine)! Au début, vous imaginez que les scénaristes ont introduit cette information pour réveiller votre intérêt et votre curiosité, vous vous attachez à vos préjugés douillets dans lesquels vous vous êtes confortablement installés. Mais Root Letter revient encore à la charge et vous surprends à nouveau au fur et à mesure de votre progression.
Il m’est difficile malheureusement de raconter plus sur le jeu sans vous spoiler l’histoire, ce qui est un peu ennuyeux car c’est quand même l’intérêt majeur d’un Visual-Novel, mais je peux vous assurer que vous ne risquez pas de tomber dans la lassitude et que l’intrigue saura vous surprendre!
Telle une bonne pièce de théâtre, l’histoire se déroule comme une pièce en 3 actes: les trois premiers chapitres constituent le premier acte qui permettent au joueur de rentrer dans l’histoire et de comprendre comment interagir dans ce Visual-Novel, le second acte (chapitres 4 à 7) est celui qui vous assène ce fameux coup derrière la nuque et relance l’intrigue pour vous et pour le héros, et finalement le troisième acte (chapitres 8 à 10) est celui de l’apothéose, du bouquet final, là où finalement l’histoire se conclue et se révèle en fonction des choix que vous avez effectué préalablement.
Je suis peut être dans l’exagération mais j’aime bien comparer Root Letter à Usual Suspects (A VOIR ABSOLUMENT AUSSI !!) où l’intrigue ne se comprends parfaitement qu’à la fin du récit. Vous ne lâcherez pas le jeu avant de l’avoir fini!
Le bouquet final!
Contrairement à nos craintes, l’intrigue de Root Letter est largement à la hauteur de nos attentes et sa rejouabilité est importante avec cinq fins totalement différentes (le jeu ne se limite d’ailleurs pas à une bonne et à une mauvaise fin, on en est trèèèèèès loin).
Les mécanismes pour immerger le joueur dans l’histoire sont bien établis et certains concepts liés à l’interrogatoire sont prometteurs bien qu’encore perfectibles.
Les graphismes sont splendides et vous donnent envie de découvrir encore plus la ravissante ville de Matsue. Appuyé par une musique qui sait s’adapter au contexte, elle apporte un dynamisme particulièrement incroyable pour un Visual-Novel.
Après un petit soucis de jeunesse insignifiant rapidement corrigé par les talentueux développeurs de chez Kadokawa Games, PQube et Rice Digital nous propose ici un Visual-Novel parfait qui mérite sa place dans la collection des habitués du genre et peut être une très bonne entrée en la matière pour les néophytes du genre.
Test réalisé sur la version européenne de Root Letter en dématérialisé grâce à un code gracieusement fourni par PQube et Rice Digital France que nous remercions.
L’édition limitée physique est encore disponible chez Rice Digital, de même que pour l’édition classique chez Amazon.