C’est tout neuf ! Enfin presque… Enfin pas du tout en fait…
Brass c’est l’oeuvre ludique de Martin Wallace, sortie originalement en 2007 et illustré par Peter Dennis chez Warfrog. Si l’auteur a plusieurs bons jeux à son répertoire, il se chuchote que Brass est sa plus belle création. N’ayant pas joué à tous les jeux du Monsieur, je me garderai bien d’être aussi catégorique. Mais c’est toujours le genre d’argument qui attise l’intérêt.
Comme vous pouvez le voir à la couverture, ci-contre, Brass avait un style graphique assez daté. Choix artistique qui se défend mais qui personnellement m’a laissé froid.
En 2017, pour les 10 ans du jeu, un financement participatif remet Brass au goût du jour grâce à l’éditeur Roxley. 13 699 contributeurs, 1 718 708 CA$ récoltés et quelques mois plus tard, Brass Lancashire et Birmingham sortaient.
Oui 2 jeux. Le premier étant le jeu d’origine de Martin Wallace relooké et de façon sublime par David Forest, Lina Cossette et Damien Mammoliti. Le deuxième est une nouvelle version du titre d’origine. Développé conjointement par Martin Wallace, Gavan Brown, et Matt Tolman. On vous explique les différences un peu plus loin.
Brass en Français !
Grâce à Funforge on peut enfin mettre la main sur ces petits bijoux en français. L’éditeur vient de sortir les deux jeux dans la langue de Molière ! Les jeux n’ont pas de texte sur le matériel mais leur localisation permettra de les mettre à la porté de tous les joueurs et de passer facilement la barrière de la règle en anglais pour en profiter.
Pour être franc, on est bien content de cette localisation, Brass a éveillé notre curiosité au moment de son financement et encore plus quand on a vu de multiples parties et les joueurs en parler avec des étoiles dans les yeux.
Et les jeux sinon ?
C’est vrai ! Retournons à Brass. Nous allons évoquer la trame principale des deux jeux pour le moment, nous rentrerons dans les spécificités de chacun un peu plus tard. Dans le jeu de Martin Wallace, vous allez incarner un entrepreneur qui va tenter d’agrandir son empire économique et sa richesse en construisant les bonnes industries au bon moment pour que ces dernières soient utiles aussi bien à vous qu’à vos concurrents. Il faudra construire, améliorer, créer des réseaux pour acheminer les marchandises permettant de continuer de construire d’autres entreprises pour générer toujours plus d’argent et de points de victoire.
Le tout dans un immense réseau interdépendant. Vos constructions influenceront vos adversaires et inversement. Vous pourrez vous servir de leurs ressources mais vous leur accorderez des points en contrepartie.
Petite industrie deviendra grande
La base du jeu est assez simple, à votre tour, vous effectuez 2 actions parmi la liste suivante :
- Construire des industries
- Agrandir le réseau (de canaux ou de rails)
- Vendre des industries
- Développer votre niveau industriel
- Emprunter
Pour chaque action, vous devrez vous défausser d’une carte parmi les huit que vous avez en main. Si la plus part du temps, le choix des cartes n’impactera pas vos actions. La construction d’industries demandera des cartes désignant l’industrie ou la ville dans laquelle vous voulez l’installer.
Il est très peu avisé de balancer des cartes à l’aveugle pour faire ses actions. Il faut réfléchir à l’avance à quelle industrie ou quelle lieu vous souhaitez occuper.
Le nombre de cartes par lieu et par industrie étant connu via une aide de joueurs, si vous êtes attentifs à ce que jouent vos adversaires, vous pourrez établir une stratégie gagnante en étudiant les lieux délaissés par eux.
Interactions à fonds
Toute l’élégance de Brass se trouve dans les interactions entre joueurs. En créant des canaux/rails vous augmentez votre réseau qui permettra de vous installer dans de nouvelles villes. Mais allez également connecter les villes et les joueurs entre eux.
En les connectant, vous allez permettre aux autres joueurs et à vous même d’utiliser des industries reliées entre elles. Et c’est primordial ! Car construire une industrie ne voudra pas dire marquer des points tout de suite. Chaque industrie à sa façon de marquer des points.
Pour les mines de charbon et les sidérurgies, il faudra vider entièrement leur réserve de matière, en l’utilisant pour construire d’autres industries ou en réapprovisionnant le marché général.
Pour les industries de coton, il faudra vendre sa production sur le marché intérieur ou via des ports, qui vous donneront des points à ce moment là.
Les chantiers navals, exception à la règle, sont les seuls à donner des points et du revenu dès construction.
Toutes les industries sont interdépendantes. Pour marquer des points avec l’industrie du coton, vous devez exporter ce dernier, si vous l’exportez via des marchés extérieurs, votre revenu va vite baisser à cause de la saturation du marché. Par contre si vous utilisez des ports pour vendre votre coton, vous les vendrez au prix fort.
Mais il faudra réfléchir car en vendant au prix fort dans un port qui n’est pas le votre, vous offrirez à son possesseur des points de victoire et du revenu. Certes vous aurez fait une bonne affaire de votre côté, mais vous aurez également rendu service à un adversaire.
Les mines de charbon et les sidérurgies auront le même dilemme. Pour marquer des points, vous devrez les vider de leurs ressources. Vos adversaires auront le choix de prendre des ressources dans vos industries mais en profitant de cette matière première gratuite, ils vous aideront à marquer des points.
Chaque action doit être sous pesée, réfléchie et mesurée. L’opportunisme n’est pas toujours la meilleure des solutions, vous avancerez à moindre coût mais vous ferez peut être plus progresser les autres que vous.
On ne fait rien sans les autres dans Brass, on doit toujours réussir à se placer au bon endroit au bon moment. Savoir profiter des autres sans en être dépendant est un art qu’on acquière rapidement.
L’ordre des tours lui même est impacté par vos actions et celles des autres joueurs. Plus vous dépenserez dans une manche, plus votre position dans la suivante sera éloignée de la 1ère place.
2 périodes
Le jeu est partagé en deux périodes : Celui des canaux puis celui du rail.
A chaque période, vous aurez des possibilités de construction différentes mais la plus marquée est celle des moyens de liaisons entre les différentes villes. Comme leur nom l’indique bien, dans la première période vous pourrez profiter des canaux présents sur la carte pour acheminer vos marchandises. Alors que dans la deuxième ère, les canaux disparaîtront pour laisser la place aux chemins de fer.
Toutes les liaisons seront à refaire, rebattant le réseau et ses implications.
Les industries de niveau de développement 1 seront balayées du plateau, prenez le temps de faire ce qui doit être fait avec ces dernières avant qu’elles ne soient déclarées inutiles et vous auront seulement fait perdre une action.
Certaines industries ne pourront être construites que pendant une période ou l’autre.
Lancashire VS Birmingham
Brass se décline en 2 nouvelles éditions : Lancashire et Birmingham.
Si le cœur du jeu est complètement le même : Une industrialisation de la région via des interactions fortes pendant deux périodes. Pour chaque action on défausse une carte de sa main, etc… Bref très semblable au premier abord mais Birmingham apporte son lot de nouveautés.
Déjà de nouvelles industries : Poterie, Produits manufacturés et Bières.
Pour les deux premières ressources, la vente à l’export, le système de vente du coton qui était assez aléatoire disparaît. Et heureusement car les ventes étant plus importantes dans Birmingham, la frustration aurait été trop grande.
Pour renouveler le plaisir, en début de partie, les lieux d’exportation sont posés aléatoirement. Chaque partie aura un goût de renouveau.
Revenons quelques instants sur la Bière qui est un nouvel élément assez important. La bière était à l’époque plus saine que l’eau qui n’était au final que rarement potable. On évitait des maladies en buvant de la bière. (Cette excuse ne marche plus de nos jours, j’ai essayé…)
Dans Birmingham, vous allez devoir vous servir de cette ressource pour exporter, encore une fois de l’interaction entre les industries et les joueurs. La bière devra être consommée pour exporter et même pour construire des rails lors de la deuxième période, c’est une ressource indispensable à tout le monde, bien construire ses brasseries est primordial !
Lors de nos parties, on a senti que l’argent était moins une contrainte que dans Lancashire. Les industries rapportant des points de victoire et de revenus de façon moins linéaires que dans le premier opus sont certainement la cause de ce changement mais il nous faudra plus de parties pour être sûrs de nous.
Au final Birmingham est plus riche que Lancashire et ce n’est pas forcément gage d’un meilleur jeu, il est très semblable mais différent. Les sensations de jeux ne sont pas les mêmes, Lancashire est plus agressif entre les joueurs alors que Birmingham avec la diversification des industries permet d’essayer d’avoir des monopoles plus facilement.
Les deux jeux ne font pas doublon et si vous aimez l’un des deux, vous pouvez vous dirigez vers le deuxième le sourire aux lèvres. Les sensations de jeux sont juste ce qu’il faut de différent pour renouveler le plaisir de Brass.
Une petite merveille ludique éditée de façon brillante
Rempli de bonnes idées, Brass est un formidable jeu qui méritait une édition aussi belle que celle-ci.
Les graphismes de David Forest et Lina Cossette, sont splendides et rendent hommage à cette ambiance si particulière des années 1800.
Chez nous on se permet un peu d’anachronisme en se mettant l’OST de Peaky Blinders pour s’immerger encore plus dans l’ambiance de Birmingham. ^^
Les plateaux sont magnifiques, bien qu’un peu sombre pour une lecture optimum. Ne jouez pas à la bougie pour bien voir les canaux.
Sur Lancashire on profite même d’un plateau double face avec un côté spécialement dédié aux parties à 2 joueurs, un mode créé par la communauté et officialisé dans cette réédition.
PLATEAU 2 JOUEURS
Pour Birmingham, on a une face jour et une nuit. Rien ne les différencie mécaniquement, on a juste le plaisir de pouvoir choisir dans quelle ambiance on veut jouer.
Si l’édition en boutique n’a pas les jetons de poker comme dans l’édition KS, on a en main du beau matériel de qualité. Les cartes sont agréables à manipuler et les jetons épais. On garde même les dessins alternatifs débloqués en SG lors de la campagne.
Petit bémol, on s’est retrouvé à court de cubes charbon/fer lors de nos parties. Ces ressources étant virtuellement illimitées, nous avons dû compenser en prenant des cubes dans l’autre boîte. C’est dommage qu’avec une aussi belle édition, quelques cubes soient manquant.
Après ça peut être une excuse pour acheter le Brass qui vous manque ! ^^
Les règles
On m’avait prévenu que Brass était un jeu complexe, à la lecture des règles on se heurte à plusieurs points et des exceptions qui viennent densifier la compréhension mais une fois le premier tour achevé, tout est très clair et le jeu est très fluide. Les règles françaises traduites par Funforge sont très explicites et remplies d’exemples.
On apprécie beaucoup les nombreux exemples.
Pour un jeu de ce calibre, qui ravira les fan de gestions, je trouve même qu’il est très accessible. La difficulté réside dans les décisions et l’optimisation. La mécanique ronronne, c’est un plaisir à jouer et les 2 à 3 heures de la partie ne se font pas sentir.
Brass dessus Brass dessous
Brass vous plonge dans l’être industrielle de la Grande-Bretagne. Vous devrez développer votre empire industriel tout en prenant en compte vos adversaires qui parfois seront vos meilleurs alliés pour vous fournir des ressources à moindre coûts. Mais en utilisant leurs ressources, vous les avantagerez en les aidant à faire de points. Il vaut mieux parfois payer le prix fort pour ne pas trop avantager un autre joueur. Brass Lancashire et Brass Birmingham ont un ADN commun mais ne sont pas pour autant identiques. Si les deux baignent dans l’interaction avec les autres joueurs, ils ont leur spécificités dans leurs industries et sur les sensations de jeux. Les deux titres raviront les fans de gestion, tout est entremêlé, connecté. Chaque décision doit se faire dans l’optique de son développement personnel mais aussi en prenant en compte celui des autres joueurs. Si Birmingham propose plus d’industries, la tension reste palpable. De nos parties est ressortie une « agressivité » plus exacerbée avec Lancashire mais une sécheresse monétaire plus importante qu’il est nécessaire d’apprendre à gérer.
Deux jeux semblables mais pour autant apportant des sensations différentes. On vous conseillera de commencer par Lancashire si vous ne connaissez pas Brass. Si vous le connaissez, cette édition sublimant le jeu de 2007, vous serez ravi de retrouver le titre remis au goût du jour graphiquement. Vous pouvez aussi vous diriger vers Birmingham sans craindre de faire doublon dans votre ludothèque. Amenant nouvelles mécaniques et renouveau dans les parties, Brass Birmingham a su réinventer Brass sans pour autant perdre ce qui fait l’essence même du jeu de Martin Wallace.
La Récap de la Rédac
Nombre de joueurs | De 2 à 4 joueurs |
Durée d’une partie | Environ 120 minutes |
Auteurs | Martin Wallace pour Lancashire Martin Wallace, Gavan Brown et Matt Tolman pour Birmingham |
Illustrateur | David Forest et Lina Cossette |
Éditeur | Funforge |
Prix | Environ 60€ pour Brass Lancashire Chez Philibert Chez Playin Environ 60€ pour Brass Birmingham Chez Philibert Chez Playin |
Les liens dans le tableau récap sont affiliés chez Playin et Philibert.net. En passant par eux pour vos achats, vous pourrez soutenir le site, en nous permettant d’acheter de nouveaux jeux. Merci à ceux qui le feront !